jeudi 20 septembre 2007

Couper les ponts...

Ce soir, ma mère est venue me visiter... En fait, plus mon fils que moi mais bon! Elle est surveillante d'élève à l'école secondaire et elle voulait me parler de certains élèves que j'avais eu dans une école primaire voisine et qui fréquentaient maintenant cette école.

En me nommant les noms, je n'ai pas été surprise qu'ils aient déjà commencer à "ressortir" du lot. Ce sont des élèves qui ont une lourde histoire de vie...

Je lui parlais de ces élèves. Il y a M. Son frère le plus vieux est dans une classe TC (trouble du comportement) sévère, lui, sa soeur un peu plus jeune qui est la préférée de sa mère, une autre soeur plus jeune autiste et le dernier qui a de sérieux problèmes de santé mentale. M. essaie de bien fonctionner... Son père est décédé. C'est l'enfant "oublié" dans le lot. Il est souvent mal habillé, il se cherche une place et il ne sait pas la prendre adéquatement... Oui, il a beaucoup de comportements déviants, mais il a tellement une lourde histoire...

S. Tellement rejeté des autres et persécuté, que maintenant, il est le persécuteur... Avant de se faire attaquer, il attaque. S a fait des vols, il est violent mais la façade est facile à brisée et on se rend compte que nous avons un ado complètement démoli devant soi... S a tellement une pauvre estime de lui même qu'il se dit qu'il n'a rien à perdre...

Il y a V. la plus vieille d'une grande famille, dont aucun de ses frères et soeurs ont le même père. V doit assumer beaucoup de tâches à la maison, elle doit être parfaite en tout temps devant sa mère et son/ses nouveau(x) beaux-pères... À l'école, elle en a marre d'être fine et patiente... elle pette sa coche.

Il y a D, que la mère rejette non-officiellement, parce qu'il est TDAH et qu'il louche d'un oeil. Il n'est pas l'enfant "parfait" qu'elle aurait aimée avoir et elle donne toute son affection à sa jeune soeur. D est dépressif, il demande beaucoup d'attention et il ne sait pas comment l'avoir parce que naturellement, chez lui, il se fait repousser du revers de la main.

Il y a C, consommateur à 10 ans, balloté d'une famille d'accueil à une autre parce qu'il est "difficile" dans un quotidien...

Il y a A, abusée pendant plusieurs années par son père et un oncle, convaincue que la sexualité est le seul moyen de se faire aimer des autres...

Je connais ces élèves et ces souffrances. Ça me faisait énormément de peine de savoir qu'ils n'allaient pas bien... J'aimerais tellement les suivre et continuer le travail que je faisais auprès d'eux...

Ma mère m'a dit que je devais couper le cordon, que je ne pouvais pas tous les sauver. Elle m'a dit que j'en avais encore tout plein d'autres dans ma nouvelle école qui allaient avoir besoin de moi...

Elle a ajoutée qu'elle n'avait pas de problèmes avec ces élèves là. Ils allaient la voir facilement. Elle a ajouté: "Certains sont venus me voir en me disant: "Est-ce que tu es la mère à Mercredie?" et je leur ai dit que oui, j'étais ta mère. Ils me disaient tous qu'ils t'avaient beaucoup aimé et qu'ils s'ennuyaient de toi. Mais tu sais, si j'ai un bon contact avec eux, ce n'est pas juste parce que je les aimes bien ces enfants là, mais parce qu'à travers moi, ils conservent le lien qu'il avaient avec toi..."

5 commentaires:

Valou a dit...

J'ai trouvé ton texte très touchant. Ça ne doit pas être évident de couper les ponts avec ces jeunes car malgré tout, on doit s'attacher.

Moi qui voulait étudier en pyscho-éducation, je n'aurais pas fait long feu avec ma grande sensibilité.

Je souhaite à ces enfants qu'une nouvelle route s'ouvre devant eux.

Unknown a dit...

Tu ne pourras jamais vraiment coupé les ponts avec ces enfants, pour la simple et bonne raison que tu les a connus. Ils feront toujours partie de ta vie et même dans 20 ans, tu te demanderas ce qu'ils sont devenus.

Tout ce que tu peux espèrer, c'est qu'ils vont bien allés sur leur chemin de vie :-)

Chantal a dit...

Ton texte me touche beaucoup. Je comprend pourquoi tu ne peut couper les ponts. c'est difficile et si c'étais nous, on aimerais bien être aidé.

Mercredie a dit...

@Machavalou: tu as manqué une occasion unique de faire le plus beau métier du monde... malgré tout! ;)

@Ivellios: En effet, quand on a travaillé super fort avec certains enfants, on ne peu s'empêcher d'avoir une pensée pour eux...

@Chantal: Il est effectivement difficile de couper les ponts... mais comme ma mère le dit aussi, je ne peux les sauver tous...

Nat a dit...

On entend parfois vaguement parler de des cas comme ça, et ça nous touche. Mais de le vivre quotidiennement, ça doit arracher des morceaux du coeur, ouff.